Ils étaient les hommes et les femmes du sable, du vent, de la lumière, de la nuit.


... en tête de la caravane, il y avait les hommes, enveloppés dans leurs manteaux de laine, leurs visages masqués par un voile bleu. Avec eux marchaient deux ou trois dromadaires, puis les chèvres et les moutons harcelés par les jeunes garçons. Les femmes fermaient la marche.


Désert. Le Clézio.

mercredi 30 septembre 2009

Songe de Jan Petrus

Après le naufrage, Jan Petrus, isolé sur le rocher noir situé à l'extrême Sud de l'île du Ferblantier, contemple l'horizon chargés de cumulo-nimbus, annonciateurs de futures tempêtes et de catastrophes marines promettant une destruction totale aux esquifs servant à la pêche côtière. Il se souvient du séjour dans la forêt tropicale, des marches épuisantes et des rencontres sous les palétuviers, des animaux étranges qui s'enfuyaient à son approche et de la nourriture végétale, la seule qu'il pouvait avaler. L'angoisse le tenaillait et lui serrait la gorge comme un garrot posé par un ange de l'enfer,nu dans la touffeur environnante, exécutant une danse lascive, exhibant ses attributs en longues dagues aux reflets argentés. Jan Petrus vit en poésie. Pour lui tout est poème, chant des sirènes et grognement des ours, phrase musicale de l'insecte, le cri de la victime torturée à l'envie dans les bas fonds des immeubles policiers, le noyé étendu sur la grève, le ventre gonflé, une fleur de bave rosée au coin des lèvres, les jambes encore frappées par le ressac écumant. Jan Petrus aime promener son corps décharné sur le sable froid dans les petits matins gris du bord de mer. La bruine salée imprègne son visage et sa chevelure qu'il a brune et bouclée, abondante, et qui lui fait un visage de prophète. Il y a de la poésie dans son regard.
Jan petrus vient de découvrir une oeuvre ancienne. Il s'agit de " La Barque silencieuse "de Pascal Quignard qu'il nous lit bien volontiers. Le diable de poussière "On appelle diable de poussière une petite tornade minuscule, haute comme deux ou trois hommes superposés, qui soulève la poussière ou la paille des champs au mois d'août.Le diable arrive au moment des orages, Colonne jaune qui s'avance en errant. Forme lumineuse, granuleuse, qui devance la foudre et annonce les éclairs. La forme tourbillonne à vive allure au-dessus des sillons dont elle prélève la terre, ou sur la grève de la rive dont elle arrache le sable, ou le long du sentier dont elle s'effondre le plus souvent dans les branchages d'un bois. Ou encore elle s'écrase sur la surface de l'eau. Il arrive que la nuit ne se retire pas tout entière des jours que nous vivons. Nos corps ont alors en plein jour des réactions qui ne sont pas syncrones. Ils ont le visage de la nuit passée. A midi sonné nous vivons encore un cauchemar. Même quand nous introduisons la clé dans la serrure de notre porte au terme de la journée de travail, nous sommes encore bouleversés par ceux que nous avons revu dans notre rêve et surtout par ce qu'ils nous ont dit. Nous avons beau nous frotter les paupières, nous avons beau porter de l'eau sur nos joues et sur notre front, la nuit laisse traîner quelques images qui luisent d'une lueur qui ne vient certainement pas du jour astral."

dimanche 27 septembre 2009

Kalahari Road.Peut-être Windhoek.

Ben est aux anges et le trajet infernal continue. A grande vitesse le véhicule retapé par ses soins dévore les Kilomètres. Toujours vigilant il observe le visage de Fausta. Pour joindre la frontière à Mamuno il faut compter 1000 Km environ. Et sans étapes. Juste un arrêt-pipi à l'abri des dunes majestueuses qui jalonnent la piste, un bol de riz vite cuit sur le réchaud de camping, un peu d'eau, du lait fermenté, et hue dia on repart vers l'ouest. Homme étrange que ce Comte Gianfranco. La rumeur publique, la bonne société Vénitienne dit que ce personnage haut en couleurs n'est pas plus comte que le plus miséreux des gondoliers du Canale di San Marco. Fausta n'en a cure. Ce personnage fantasque lui redonne l'énergie créatrice qu'elle avait perdue au contact de l'industriel padouan. Il lui fallait maintenant vivre de nouvelles aventures... mais a quel prix? Le choix est maintenant fait et elle doit s'attendre à d'étranges rencontres. On se moque dans les salons. Gianfranco et son amourette!! Ah!ah!ah! ça rigole autour des tables de baccarat. Des messes basses dans les boudoirs. La journée avance et le diesel crache sa fumée noire. Une sale odeur qui vous prend à la gorge pénètre l'habitacle. Fausta enveloppe sa tête et voile son visage. Seuls ses yeux lancent la flamme de son regard de feu, ce qui intimide beaucoup l'ami Ben. La femme est pour lui une bizarrerie de la nature. Il sait ce qu'il faut faire pour avoir un enfant (il en a huit). Mais il ne comprend pas pourquoi des hommes, des aventuriers comme Gianfranco se précipitent dans des situations étranges. Pourquoi ces hommes donnent leur vie et leur fortune pour aller au bout de leurs désirs. Bof! Lui il gagne du fric et comme il adore conduire il irait jusqu'en enfer avec cette belle italienne. Bon! L'aéroport de Windhoek. C'est un point de chute. Mais jusque là? Que va t-il se passer sur la route, pendant la traversée du désert. La journée fut chaude et seulement la moitié du chemin est faite. Quelques heures de repos, et le départ sera donné aux premières heures fraîches. Confiante Fausta étend son corps qui voluptueusement se détend, relâchement complet de ses muscles crispés. Ce soir il n'y aura pas de bain dans la piscine, pas de moustiquaires. Il n'y aura pas non plus la présence du compagnon des heures nocturnes. Avant de fermer les yeux elle observe le lent glissement d'un scorpion sur le sable. " Scorpion n'est ce pas le signe astrologique de G." La lune est pleine. Quelques cris d'animaux.

lundi 21 septembre 2009

Dans le désert . Fausta se souvient. Verlaine

Tes yeux d'un vert ardent gonflent mes grandes voiles Il est temps maintenant de larguer les amarres partons si tu le veux, Cythère et ses étoiles Constellent notre rut; en joyeux tintamarres Les filles de Lesbos déjà t'accompagnent prodiguent des douceurs animant tes langueurs Te cacherai-je lors des envies qui me gagnent Trois éphèbes huilés maintiennent mes ardeurs. Notre nef en écrin qui glisse sur les mers Accueille volontiers de grandes bacchanales. Le vin, le miel, le thym et les herbes amères Nous font bien tout oser. Chantées dans les annales Nos amours dépravées, scandales parfumés Nous affranchissent tant de la morale intègre Que nos voiles au vent offrent aux affamés La liberté d'aimer, de jouir d'un sexe allègre. Nos deux désirs en feu , chauffés à blanc, liquides Coulent dans le creuset de ces charmants décors Se forge un unisson qui dépasse les ides Les lunes et les sorts, l'entendement, les corps Car nous sommes unis reforgés pour tout dire Nos âmes retrouvées nos sens ardents grisés Nos baisers reconstruits nous font oublier l'ire De nos vies séparées malgré nos cœurs croisés. Sur l'île de Cythère le temple d'Aphrodite Célèbre nos tourments, et sa vestale attise Nos deux sexes brûlants, la messe sera dite Dans l'agonie du temps d'un ressac qui nous brise Mon épée trouve là le fourreau qu'elle désire La paix au parfum chaud de ta grotte qui luit Mes reins meurent au cri que ton ventre soupire La blanche écume drue ensemence la vie... Ces vers de Verlaine chantent aux oreilles de Fausta. Ben sourit en regardant dans son rétro le visage maintenant reposé de la belle. L'embarquement pour Cythère. L'embarquement... Les fêtes galantes. Suivons la piste. Bientôt l'étreinte. Une fois de plus.
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vendredi 18 septembre 2009

Désert et animaux sauvages. Bouges d'étape et pack de bière. Sur les traces du Petit Poucet

Passage de la frontière à Gaborone . Ben est riche de packs de bière et d'une belle voyageuse un peu triste qui observe le manège des sbires en charge de la surveillance des lieux. Une dernière inspection sous la limousine qui menace ruine et Ben met en marche le diesel puant et noir. avec une joie non dissimulée il provoque des quintes de toux à répétition chez les pandores . Départ pour la traversée du Kalahari. Très haut des aigles accompagnent le véhicule en fureur. Ben s'abreuve de bière locale. Balance la boîte au loin sur la piste, L'écologie? Connais pas dit-il dans un grand éclat de rire en se tournant vers Fausta, confuse et les yeux rougis par le vent, le sable, et quelques larmes discrètes. La piste est longue, semée de nids de poule Et le fracas des tôles disjointes épouvantable. Une véritable descente aux Enfers pour retrouver l'Ange Noir Gianfranco. Que devient-il ? Enlèvement ? Peu probable. Fuite pour un deal dans un de ces bouges sordides le long de la piste ? ça sent l'étrange.

lundi 14 septembre 2009

Pour vous signaler la sortie prochaine sur les écrans du film de Robert Guédiguian.

dimanche 13 septembre 2009

Le coup de fil.

La sonnerie aigrelette du portable retentit désagréablement . D.J. Martin continuait à s'agiter et Fausta détacha son regard d'un superbe danseur solitaire qui visiblement attendait un petit geste de la main ou un mouvement des lèvres en forme de baiser. Fausta se saisit du portable et le porta à son oreille droite.
" La casserole est sur le feu, Les carottes sont cuites, Chaud, chaud, les marrons!! Il n'y a plus de tabac dans la tabatière, Le petit Poucet sème des cailloux, Embarquement pour Cythère, Elle a les cuisses chaudes, Le nez creux. La route est longue, Parsemée d'embûches, J'en donne ma tête à couper, Chantons à tue-tête. Tombée du jour. Enfin cette logorrhée bizarre cessa laissant la place à un long rire d'outre - tombe.
C'était vraiment tomber sur un os car l'émission de ce texte en apparence insipide s'interrompit. Dernière phrase: Elle a les seins en forme de poire... D.J. Martin s'agite derrière ses platines. Fausta reste interloquée et se plonge dans une réflexion intense l'obligeant à se souvenir de ces inepties à une heure aussi grave. Le superbe danseur solitaire s'approche d'elle et se courbe en souriant et en dévoilant une dentition parfaite.

Miserere Allegri Gregorio

samedi 5 septembre 2009

pour rêver en pensant à Fausta et Gianfranco

Le personnage de Fausta doit beaucoup à mes souvenirs de films avec Ava Gardner, et Gianfranco ressemble un peu à Robert Taylor et à Vittorio Gassman, tout çà est résolument teinté du souffle de la Metro Goldwin Mayer de la meilleure époque.; Ahhhhh! nostalgie , quand tu nous tient!!!

Le sommeil.

Le sommeil Douceur de la nuit Africaine. Senteurs du géranium en plantes innombrables dans le parc. Le chant des grillons. Les cascades dans le lointain. Corps étendus bercés dans le sommeil. Mais Gianfranco a le sommeil léger. Le sommeil du baroudeur. Le sommeil de celui qui, en perpétuelle veille, Est aux aguets. Le moindre pas dans le parc. L’appel lointain de l’homme solitaire qui parcourt la savane, A la recherche d’un gibier surpris dans sa tanière. Le braconnier Sur la trace du boa constrictor Dont la peau donnera de magnifiques ceintures. Les yeux grands ouverts Il fixe le sommet en coupole de la moustiquaire. Il réfléchit à ses projets futurs… Un morceau de papier griffonné par Ben Lui a été remis discrètement par le portier de l’hôtel. « Faut s’voir demain Quand tu voudras » lui dit Ben Qui ne s’encombre pas de salamalecs ! « A l’heure de la sieste ». Et vlan ! Ce n’est pas quand je veux, pense Gian… Une partie fine qui tombe à l’eau… Heureusement il y a la piscine. Fausta pourra s’abandonner aux délices de Capoue. Certainement les barbus de trois jours, Visages en lame de couteau, Etranges costumes noirs en lin, griffes Grands Couturiers, Désirent quelques éclaircissements sur sa venue. Il pivote légèrement, Admire le corps étendu, Le dos, les hanches rebondies. Son doigt parcourt savamment le sommet du crâne, la nuque, Glisse entre les omoplates Et descend jusqu’aux lombes, Puis au-delà, pour se perdre Dans la tiédeur douce et parfumée de l’intimité de Fausta. La lumière du jour pénètre. Le couple s’anime. Les yeux noirs du séducteur luisent. Le visage se transforme. L’Homme se transforme en combattant. Les diamants, la poudre blanche, le ciel blanchit, La chaleur équatoriale. Le sicilien tapis dans les fourrés. Un prédateur.

mardi 1 septembre 2009

Une lave incandescente me submerge.( Gianfranco)

« C’est une lave incandescente qui me submerge », pense Gianfranco, sous la douche bienfaisante qui stimule sa musculature fatiguée. Fausta est déjà étendue dans la soie des draps luxueux. L’encorbellement des bras au dessus de son corps semble être une mandorle lumineuse, le blanc nacré de la chair rehaussant sa chevelure brune aux reflets mordorés. La grande baie vitrée est largement ouverte. Le chant des oiseaux peuplant le parc de l’hôtel, chant du matin, éveil de la faune et de la flore, accompagne le bruissement de l’arrosage abondant des fourrés, des fleurs en parterre, des arbrisseaux récemment plantés. Un concert fait de sensualité qui enchante les deux amants, leur donne maintenant une liberté gestuelle, une harmonie muette dans leurs déplacements. Assis en lotus sur l’épais tapis de laine, Gianfranco médite comme à l’accoutumée, ouvrant son corps au cheminement libre de l’énergie. Et c’est naturellement que Fausta dans un déplacement léger semblable à une danse vient se placer et s’unir au corps du comte maintenant rassuré sur les qualités sexuelles de cette femme rencontrée dans un palais vénitien le dernier jour du carnaval. L’accord des deux est parfait. C’est une longue méditation, avec des moments de jouissance retenue. Ils resteront ainsi, unis, enlacés, dans le calme et le ravissement. Jusqu’au soir ils échangèrent unis par le bas l’énergie bienfaisante qui circula librement. Illumina leurs chakras. Le soir ils firent une longue promenade dans l’immense parc de l’hôtel. La nuit fut calme. La fraîcheur africaine, fraîcheur de la nuit, calma leurs sens excités. © 2009 christian cazals