Fausta vécut une nuit merveilleuse.
La goélette s’engagea sur une mer étale, un vent léger portant le voilier vers le Sud.
Après l’incendie d’un coucher de soleil grandiose sur les côtes italiennes de l’Adriatique, le ciel devint de plus en plus sombre pour atteindre l’obscurité complète vers la minuit. C’est alors que le ciel se piqueta de milliers de petites étoiles scintillantes.
A la nuit complète l’équipage se retira dans la cabine commune, seul le timonier à la barre, restait impassible, l’œil vif braqué sur l’immensité des flots.
Fausta sortit sur le pont, et l’odeur de la mer, parfum rare d’iode et d’algues pourrissantes fit gonfler ses narines.
Elle saisit le bastingage et se dirigea vers l’avant, sa démarche féline faisant rouler ses hanches. Son corps de bel animal prédateur, malgré le roulis du voilier, s’harmonisait dans son balancement avec l’ensemble des filins tendus et des voiles gonflées.
L’écume projetée par l’étrave faisait de son visage un masque sur lequel des perles fines et colorées glissaient le long des narines.
Une couronne translucide ourlait la racine de sa chevelure.
Elle posa doucement sa main sur l’urne fixée au sommet de l’étrave, elle épousa dans un mouvement caressant la forme du vase funéraire, et se penchant lentement embrassa l’albâtre ruisselant. Ses lèvres se gonflèrent et la sensualité de sa bouche s’illumina, la pleine lune donnant un relief charnel à la scène discrètement observée par l’homme à la barre.
Le jeune éphèbe vint se blottir contre elle, ses hanches frissonnèrent, un léger sourire traversa son visage.
Nul doute que le souvenir de Gianfranco, le séduisant diamantaire, était dans ses pensées. A ce jour il était en affaire dans les îles de la lagune.
Elle avait eu un échange téléphonique très bref le jour du décès de Luigi. Elle savait qu’il devait partir prochainement pour l’Afrique… Peut être l’Inde aussi. Elle aurait voulu passer quelques jours avec lui à la Villa Malaparte prés de l’île de Capri, mais ce diable d’homme qui lui avait ouvert à nouveau les portes du plaisir était insaisissable. La lune basculait, la nuit devenait de plus en plus froide. Elle détacha sa main engourdie de l’urne,
se libéra de la présence spirituelle de Luigi et regagna sa cabine accompagnée du jeune homme à la chevelure bouclée. Elle pensait, quand elle le voyait à son ami Pasolini assassiné sauvagement sur une plage romaine.
Elle pleurait alors car le souvenir de ce meurtre était toujours vivant en elle.
L’homme de quart changea et la goélette continua sa course .
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Ils étaient les hommes et les femmes du sable, du vent, de la lumière, de la nuit.
... en tête de la caravane, il y avait les hommes, enveloppés dans leurs manteaux de laine, leurs visages masqués par un voile bleu. Avec eux marchaient deux ou trois dromadaires, puis les chèvres et les moutons harcelés par les jeunes garçons. Les femmes fermaient la marche.
Désert. Le Clézio.
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