Ils étaient les hommes et les femmes du sable, du vent, de la lumière, de la nuit.


... en tête de la caravane, il y avait les hommes, enveloppés dans leurs manteaux de laine, leurs visages masqués par un voile bleu. Avec eux marchaient deux ou trois dromadaires, puis les chèvres et les moutons harcelés par les jeunes garçons. Les femmes fermaient la marche.


Désert. Le Clézio.

mardi 26 juillet 2011

LA POIGNÉE de POUSSIÈRE. Raconté par Boucherif

Les travailleurs du village






Au petit matin le village s'étire le long d'une grande avenue de latérite mille fois martelée par le pas des troupeaux en liberté, le roulement des véhicules à bout de souffle, le pas des enfants groupés en rang serré, le charroi interminable des attelages chargés de bois mort et de briques de terre séchée, la base de la construction des cases au toit de chaume.
Un nuage de poussière retombe sur les arbres les hommes et les animaux, les recouvrant d'une pellicule dense et rougeâtre.
J'aime évoluer dans ce petit village, proche de la mer, aux senteurs marines quand le vent vient du large, le cri des oiseaux de mer chante la joie en se mêlant à celui des enfants et des mères fières de leur progéniture.

Sur le pas de sa belle case fleurie par les bougainvilliers, le plus riche du village, se tient dès l'aube et regarde passer les travailleurs. C'est un négociant en matériaux de construction. Il aime bien être ainsi, debout, un magnifique sourire illuminant son visage.

Amadou fait sécher les poissons. Ceux que lui laissent les pêcheurs dont les pirogues sont échouées sur la plage.

Puis il les vend. Il se tient un peu avant le marché, sur le bord de la route.
Abdallah le regarde tristement, à chaque fois qu'il passe.
Un jour, n'y tenant plus, il lui propose de lui donner un peu d'argent: " Combien te faut-il? Ainsi tu éviteras ces efforts qui usent tes vieux os et tu pourras nourrir ta famille."
Amadou, en plissant ses yeux, un sourire malin, lui répond: donne moi une poignée de poussière. Cela suffira.
Il prit cette obole comme s'il venait de recevoir une poignée d'or et partit vers la plage... Cela dura des mois.

Un jour n'y tenant plus, et voulant éclaircir ce manège, Abdallah l'interpella et lui dit: Amadou!! Si tu ne désires qu'une poignée de poussière alors baisse toi et ramasse .

Amadou, en le regardant droit dans les yeux, et d'une voix très douce lui répondit: Homme riche, te voila excédé par le simple fait de te baisser pour me ramasser une poignée de poussière, qu'adviendrait-il si chaque matin je me présentais à ta porte pour recevoir une pièce d'argent?
Laisse moi gagner ma vie à ma façon. La sueur de mon front ne sera jamais importunée par le don qu'elle me fait chaque jour. Mais toute autre personne le sera tôt ou tard.


Merci à AMADOU HAMPATE BA pour la transmission orale de ce conte peul.

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