Ils étaient les hommes et les femmes du sable, du vent, de la lumière, de la nuit.


... en tête de la caravane, il y avait les hommes, enveloppés dans leurs manteaux de laine, leurs visages masqués par un voile bleu. Avec eux marchaient deux ou trois dromadaires, puis les chèvres et les moutons harcelés par les jeunes garçons. Les femmes fermaient la marche.


Désert. Le Clézio.

mardi 3 novembre 2009

Prix Goncourt à Marie N'Diaye. Trois femmes puissantes

Trois femmes puissantes" de Marie N'Diaye

Une femme décroche la plus haute distinction littéraire française. Cela faisait onze ans qu'une femme n'avait pas été récompensée par l'Académie Goncourt (Paule Constant pour Confidence pour confidence chez Gallimard). Depuis la création du prix en 1903, la célèbre Académie en a couronnées seulement neuf.

Muriel du Brusle

Elue dès le premier tour avec cinq voix contre deux pour Jean-Philippe Toussaint (La vérité sur Marie, Minuit) et une voix pour Delphine De Vigan (Les heures souterraines, JC Lattès), la romancière française d'origine sénégalaise qui vit depuis deux ans à Berlin, était présente au restaurant Drouant pour recevoir son prix. "Je suis très contente pour le livre et pour l'éditeur. Je suis très contente d'être une femme qui reçoit le prix Goncourt" a-t-elle déclaré aux journalistes venus en masse. Elle a qualifié de "sorte de miracle" le succès du livre. "Ce prix est inattendu. C'est aussi le couronnement et la récompense de 25 ans d'écriture et de cette opiniâtreté".

Plus ou moins dramatiques, parsemées de métaphores, ces histoires explorent les différents visages de la femme africaine, qu’elle soit fille, épouse ou veuve, lui opposant à chaque fois le point de vue ou la responsabilité des hommes.

Première page :

E t celui qui l’accueillit ou qui parut comme fortuitement sur le seuil de sa grande maison de béton, dans une intensité de lumière soudain si forte que son corps vêtu de clair paraissait la produire et la répandre lui-même, cet homme qui se tenait là, petit, alourdi, diffusant un éclat blanc comme une ampoule au néon, cet homme surgi au seuil de sa maison démesurée n’avait plus rien, se dit aussitôt Norah, de sa superbe, de sa stature, de sa jeunesse auparavant si mystérieusement constante qu’elle semblait impérissable. Il gardait les mains croisées sous son ventre et la tête inclinée sur le côté, et cette tête était grise et ce ventre saillant et mou sous la chemise blanche, au-dessus de la ceinture du pantalon crème.

Il était là, nimbé de brillance froide, tombé sans doute sur le seuil de sa maison arrogante depuis la branche de quelque flamboyant dont le jardin était planté car, se dit Norah, elle s’était approchée de la maison en fixant du regard la porte d’entrée à travers la grille et ne l’avait pas vue s’ouvrir pour livrer passage à son père – et voilà que, pourtant, il lui était apparu dans le jour finissant, cet homme irradiant et déchu dont un monstrueux coup de masse sur le crâne semblait avoir ravalé les proportions harmonieuses que Norah se rappelait à celles d’un gros homme sans cou, aux jambes lourdes et brèves.

couverture du livre "Trois femmes puissantes" de Marie N'Diaye

Trois femmes puissantes de Marie N'Diaye - Gallimard, 318 p., 19 euros.

1 commentaire:

croukougnouche a dit…

oui, c'est justice que ce prix , un peu poussiéreux à vrai dire , soit enfin accordé à une femme , et visiblement quelle femme!!