Ils étaient les hommes et les femmes du sable, du vent, de la lumière, de la nuit.


... en tête de la caravane, il y avait les hommes, enveloppés dans leurs manteaux de laine, leurs visages masqués par un voile bleu. Avec eux marchaient deux ou trois dromadaires, puis les chèvres et les moutons harcelés par les jeunes garçons. Les femmes fermaient la marche.


Désert. Le Clézio.

mercredi 20 mai 2009

Texte 5 / Retour à Padoue .

Elle sentit son corps épuisé.
Sur le haut du perron elle tremblotait et la trop grande lumière du matin l'aveuglait.
En contre bas l'eau de la lagune l'appelait et elle ne put résister à la tentation de s'approcher et de plonger la pointe de son pied - elle venait de retirer ses bottes qui comprimaient ses chevilles et la gênaient dans sa marche - . La fraîcheur de l'eau éveilla en elle un frisson de bien être.
Pleine d'une nouvelle énergie elle héla un gondolier paresseux et se fit transporter vers Padoue par le Canal de la Brenta. Un taxi de luxe la déposa devant le superbe et désuet Hôtel particulier de Luigi à deux pas de la Basilique Sant' Antonio.
Un battement particulier du coeur, une angoisse indéfinissable, ses mains devenaient moites.
Ce n'était pas la première fois que son corps s'était détaché de l'emprise de Luigi. Elle était libre et ne se privait pas de cette liberté. Alors ... pourquoi?
Elle pénétra en silence, repoussant le grand portail de bronze. Il régnait un silence étrange dans les corridors; une odeur bizarre la saisit, une odeur d'encens, de cire brûlée...
Elle avança vers le grand salon de lecture, lieu protégé, dans lequel elle venait se réfugier pour converser avec Luigi. Elle aimait l'écouter raconter ses aventures de jeunesse et l'assurait de sa fidélité. Il vieillissait et maintenant avait besoin de cette présence encore jeune et belle. Un viatique dans son parcours maintenant difficile.
Elle fut surprise de croiser le Père San Felice qui se dirigea vers elle avec un geste de compassion appuyé. Il lui saisit l'épaule, la serra contre son coeur. Mon enfant... mon enfant...Elle comprit, regarda les portes de la chambre et lentement se dirigea vers le lieu où reposait la dépouille du vieil industriel.
Sa mort était récente. Il reposait le visage calme. Fausta prit une chaise, s'assit à la tête du lit, et lui saisissant une main resta ainsi dans le calme de la méditation. Il commençait à faire sombre. Seul le prêtre et un ou deux valets priaient dans un monologue incompréhensible.

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